L'IMPORTANCE DU PATRIMOINE AFRICAIN-AMÉRICAIN
La réalité injuste issue du rapport de domination et d'exploitation des pays centraux sur les pays périphériques, n'est pas seulement un produit économique et politique marqué par des catastrophes dans ces derniers, mais aussi que la même chose se passe au niveau culturel. D'où la nécessité pour un peuple appartenant à des pays périphériques de rechercher l'affirmation de son identité. Tel est le cas, par exemple, du peuple haïtien; en tant que groupe humain spécifique issu du système esclavagiste imposé pendant des siècles aux Africains amenés de force en Amérique, ils ne peuvent échapper à ce sort. Et c'est dans ce cadre que les racines africaines qui ont joué - et jouent - un rôle fondamental dans cette affirmation identitaire, acquièrent toute leur importance, se transformant au fil des années en un rempart de la résistance populaire lorsque la grande majorité de la population haïtienne est à la limite de la subsistance humaine. C'est précisément cette identité qui, malgré les trahisons de divers dirigeants nationaux, les occupations militaires étrangères successives du territoire national, les fléaux naturels (tremblements de terre, ouragans, etc.), contribuent à donner à des millions de personnes exploitées sur cette terre la force de lutter pour la pleine liberté, une manière particulière de penser et d'agir et, surtout, d'espérer pour l'avenir.
Il faut également noter que cette façon de penser est, sans aucun doute, un véhicule de valeurs collectives, qui recourt aux origines, à l'histoire des rébellions contre la domination et l'exploitation, pour s'opposer à toutes les formes d'agression culturelle.
C'est un phénomène complexe et long, qui se construit au fil du temps, principalement à partir du patrimoine africain, de l'époque de l'esclavage à nos jours. Elle fut d'abord exprimée par les Marrons comme une forme de résistance pour échapper aux conditions subhumaines d'esclavage imposées aux plantations, pour servir plus tard de base au lancement en août 1791 de la grande rébellion des esclaves qui devait mettre fin à la domination coloniale sur 1er janvier 1804 lorsque Jean-Jacques Dessalines proclame l'indépendance d'Haïti. De plus, humiliés, opprimés et exploités, ces êtres humains ont su développer leurs croyances et religions jusqu'à créer une religion: le vaudou. Une religion qui a joué un rôle majeur dans les mouvements anticoloniaux. Oui, cette religion des opprimés n'était pas un opium, puisqu'elle devenait un instrument de libération chargé de symbolisme africain, inculquant aux esclaves la conscience révolutionnaire indispensable pour combattre et vaincre.
Dans ce cadre, le vaudou acquiert un caractère anti-esclavagiste, humaniste et international, sachant que ces esclaves qui ont conquis leur liberté en battant l'armée de Napoléon Bonaparte sur le champ de bataille après 12 ans de guerre, ont décidé de combattre l'esclavage partout dans le monde. Une manière brillante de porter le combat pour la liberté à son plus haut niveau, compte tenu de l'être humain et de ses droits et non de ses caractéristiques phénotypiques, comme l'a fait la Révolution française de juillet 1789 en mettant pas fin à l'esclavage dans les colonies françaises.
Et aujourd'hui, face à une nouvelle occupation militaire menée depuis juin 2004 par la Mission des Nations Unies pour la stabilisation d'Haïti (MINUSTAH), violant la souveraineté du peuple haïtien et le principe de l'autodétermination de la nation, et lorsque plusieurs de ses membres sont responsables de toutes sortes d'abus, des viols de filles, de femmes et de jeunes à l'introduction du choléra qui a déjà causé la mort de plus de 8 000 haïtiens et de plus de 600 000 infectés, l'affirmation de cette identité telle qu'elle s'est développée pendant la guerre d'indépendance revient au centre des débats populaires. Eh bien, au-delà de l'aliénation mentale qui affecte la minorité dominante et certains secteurs intermédiaires supposément illustrés par la soi-disant modernité occidentale, c'est le seul phénomène qui porte d'autres valeurs capables d'indiquer d'autres voies d'action pour mettre fin à tant d'injustices. Par conséquent, reprendre le chemin non de la libération et de la pleine liberté est un défi historique, et il est inévitable de retrouver la dignité sacrifiée par quelques-uns, et tout est lié à l'Afrique.
Jean Launy AVRIL
Bachelier en Sciences Juridiques et en Philosophie actuellement, Etudiant avancé en Sciences Politiques à l’Université National de Cordoba et Anthropologie à Institut Supérieur de cultures Aborigènes. Membre fondateur KONBIT-Club Culturel Haïtien à Cordoba-Argentine. Coordonnateur et membre fondateur de la Communauté Solidaire pour le Développement du Centre (CSDC). Collaborateur à l'émission " LES NOIRS À CÓRDOBA-ARGENTINE "qui passe tous les Lundis de 8h30 jusqu'à 10h AM sur la fréquence Radio Libre 92.7 FM .
jean.launy.avril@mi.unc.edu.ar
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